Par Antiquités Philippe Glédel
Mobilier XVIIIe parisien et régional, dont meubles de port.
Très rare petite table en cabaret ouvrant par un tiroir en ceinture, à piétement Louis XV ponctué de sabots. Elle est fabriquée en bois de gaïac de Saint-Domingue.
Nous l'attribuons sans difficulté à La Rochelle qui possédait les principaux comptoirs de Saint-Domingue et s'est fait une spécialité de l'emploi du gaïac dans ses ateliers.
Le modèle est effectivement d'une grande rareté, d'une part car les tables en gaïac Louis XV sont beaucoup moins courantes que les modèles Louis XIII, mais surtout du fait que celle-ci est presque exclusivement en gaïac ce qui est exceptionnel. En vérité nous n'avons jamais rencontré dans notre carrière de table Louis XV exclusivement en gaïac, exception faite d'un unique petit modèle, mais appartenant à la période Louis XIII (que nous avons placé en documentation).
Ce qui ne gâte rien c'est que nous avons affaire ici à un superbe gaïac particulièrement contrasté : bien veiné de brun sur fond clair. Sur cette table, ...
... hormis l'astragale du plateau et le pied arrière gauche qui sont en noyer, tout est de gaïac massif, y compris le plateau donc, ce qui est rarissime et constitue un tour de force (lire ci-après). Se pose la question de savoir si ces parties sont refaites et en vérité elle n'est pas simple... Malgré notre expérience, notre menuisier et nous-même ne pouvons trancher : ce qui est certain c'est que le pied en noyer, parfaitement choisi pour la veine brune bien marquée qui longe son arête *, est mortaisé au piétement depuis le XVIIIe siècle (sa façon est la même, le chevillage est le même, avec cet arrondi spécifique et inimitable du temps). Notre artisan aura-t-il manqué de gaïac ou aura-t-il refait le pied en noyer suite à un accident moins d'un décennie plus tard ? Nul se saurait vraiment le dire **.
* A noter que la chose n'est pas visible, sauf à y regarder de très très près.
** Nous penchons cependant davantage pour la thèse d'un très ancien accident restauré par le même atelier car, par expérience de certaines spécificités rochelaises, nous pensons que les deux pieds arrière auraient été fait en noyer, et non un seul. Si tel était effectivement le cas, on se devrait de penser que la bordure du plateau serait également refaite postérieurement, ce qui paraît curieux.
Le Gaïac (gaïacum sanctum / guayacan, palo santo), importé depuis le XVIe siècle pour ses propriétés curatives (d'où son nom de bois de vie ou bois saint) et pour sa dureté (d'où son autre nom de bois de fer), est un arbre poussant dans les zones tropicales d'Amérique du Sud, principalement aux Antilles, dont l'exploitation est aujourd'hui fortement régulée par la CITES du fait de son exploitation massive qui conduit peu à peu à sa quasi extinction.
Le gaïac est très certainement le bois le plus dur au monde, et en effet sa densité de près de 1.3 ne permet pas sa flottabilité. S'il a été utilisé en ébénisterie du fait de son veinage spectaculaire et de son poli naturel, il est principalement utilisé pour la fabrication de pièces de tailles réduites nécessitant des caractéristiques de résistances accrues. Ses principales utilisations sont donc pour la bijouterie et l'industrie, pour les maillets de sculpteur, les roulettes de sièges et de lits (George Jacob l'aura ainsi utilisé) et en construction navale pour les poulies et les pièces d'hélices de bateaux (on considère qu'il dure trois fois plus longtemps que l'acier ou le bronze, tant du fait de sa densité que de ses propriétés naturelles d'auto-lubrification). Le plus beau gaïac provient de l'île de Saint-Domingue.
Le bois de gaïac est si dense qu'il se prête plus volontiers au tour (c'est pourquoi on verra beaucoup de tables à pieds tournés Louis XIII, beaucoup moins à pieds galbés Louis XV) et il est quasiment impossible de le scier en planches. De plus les billes sont peu épaisses et c'est pour ces raisons que l'on ne rencontre pratiquement jamais (hormis de rarissimes et très petits spécimens) de tables fabriquées exclusivement en gaïac. Le plus souvent elles ont un plateau et un bâti de chêne, parfois en acajou pour les tables de très belle qualité, et plus rarement encore quelquefois quelques ceintures en gaïac.
Table en très bel état (plateau, ceintures, piétement) et remis en beauté par un rempli-ciré, le gaïac juste reciré (en effet ce bois, par ces qualités naturelles déjà évoquées possède un lustre très remarquable).
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