Par Stéphane Renard Fine Art
59 x 72 cm (encadrée 77 x 89,5 cm)
François Boucher présente au salon de 1742 une toile qui détourne le thème de Léda : en la décrivant comme une nymphe accompagnée d’une compagne qui se presse sur son sein, il enrichit le caractère érotique de la scène d’une dimension assez troublante. La version d’atelier que nous proposons, aux dimensions très proches, reste très fidèle à la toile présentée au Salon, aujourd’hui conservée dans une collection privée américaine.
1. François Boucher, le maître de la rocaille française
La carrière extraordinaire de François Boucher n'a pas été égalée par ses contemporains en termes de polyvalence, de cohérence et de production. Pour beaucoup, notamment les écrivains et les collectionneurs qui ont été à l'origine du regain d'intérêt pour le rococo français au cours du XIXème siècle, ses beautés sensuelles, ses cupidons dodus représentent le XVIIIe siècle français dans ce qu'il a de plus ...
... typique. Sa facilité à manier le pinceau, même lorsqu'il trahit la superficialité occasionnelle de son art, lui a permis de maîtriser tous les aspects de la peinture - histoire et mythologie, portrait, paysage, vie ordinaire et, dans le cadre de compositions plus vastes, même la nature morte. Il avait reçu une formation de graveur, et les compétences de dessinateur, qu'il a acquises dans l'atelier de Jean-François Cars (1661 - 1738), lui ont été utiles tout au long de sa carrière ; ses délicieux dessins sont l'un des aspects les plus recherchés de son œuvre.
Élève de François Lemoyne (1688 - 1737), il maîtrise l'art de la composition tandis que les quatre années qu'il passe en Italie, de 1727 à 1731, lui donnent l'accès aux œuvres des maîtres, aux classiques et à l'histoire, que son éducation modeste lui avait refusée.
À son retour à Paris en 1734, il devient membre à part entière de l'Académie royale de peinture et de sculpture avec son splendide Renaud et Armide (Paris, Musée du Louvre). Bien qu'il ait parfois peint des sujets tirés de la Bible tout au long de sa carrière, et qu'il se soit toujours considéré comme un peintre d'histoire, son propre répertoire d'héroïnes, de séductrices, de paysannes coquettes et de beautés érotiques convenait mieux à des sujets plus légers et plus décoratifs. Sa maîtrise de la technique et de la composition lui permet de passer des cartons de tapisserie à grande échelle (il travaillera tout au long de sa carrière pour les manufactures de tapisserie de Beauvais et des Gobelins, devenant directeur de cette dernière en 1755), à des chefs-d'œuvre intimes comme Diane au repos (Paris, Louvre) ou Léda et le cygne, et à quelques scènes de la vie quotidienne comme le Déjeuner (Paris, Louvre), avec ses personnages élégamment vêtus groupés autour d'une table bien dressée.
La production de Boucher, qui a connu un énorme succès et a bénéficié d'un large soutien, est prodigieuse. D'abord parrainé par la Couronne dans les années 1730, puis nommé Premier Peintre du Roi en 1765, il exécute de nombreuses commandes royales et princières jusqu'à sa mort en 1770, travaillant notamment pour la maîtresse de Louis XV, la marquise de Pompadour, dans chacun de ses palais. Toujours prêt à mettre ses talents à profit dans d'autres domaines, il conçoit des décors de théâtre et d'opéra et fournit des dessins destinés à être utilisés comme modèles pour les figures de la manufacture de porcelaine de Vincennes (plus tard Sèvres). En tant que professeur, il était très apprécié par ses nombreux élèves, parmi lesquels Fragonard, Le Prince, Deshays, Brenet, Baudouin, Lagrenée, et Madame de Pompadour elle-même.
Même David, un cousin éloigné, a été clairement influencé par Boucher dans ses premières œuvres. Jamais, depuis Le Brun, un artiste français n'avait laissé une telle empreinte sur les arts de son temps.
2. Description de l’œuvre
Léda était la fille de Thestius, roi de Pleuron et la femme de Tyndare, le roi de Sparte. Elle fut séduite par Zeus sur les bords de la rivière Eurotas, alors que celui-ci avait pris la forme d’un cygne. De cette union naquirent Hélène, la fameuse femme de Ménélas qui sera à l’origine de la guerre de Troie et Pollux l’un des Dioscures.
Cet arrière-fond mythologique n’est ici pour François Boucher qu’un prétexte pour décrire deux nymphes surprises dans l’intimité d’une grotte de verdure par un cygne venu se réfugier près d’elles. Toute notre attention est attirée par la représentation de ces deux corps féminins, le cygne-Jupiter devenant un accessoire décoratif. La deuxième femme est allongée à côté de Léda dans une position proche de celle qu’il donnera par la suite à sa fameuse Odalisque brune. Elles reposent toutes les deux sur un tissu velouté de couleur rouge-orangée qui met en valeur leurs corps nacrés et constitue une sorte d’écrin, évoquant une conque marine.
Le triangle instable ainsi constitué par les deux nymphes et le cygne est parfaitement équilibré : l’aile déployé du cygne répond à la jambe droite légèrement relevée de la nymphe allongée, mais évoque aussi le bras levé de Léda alors que le cou sinueux du cygne épouse la courbure du corps de Léda.
La présence de cette deuxième nymphe, la tête appuyée sur le sein de Léda apporte une charge érotique supplémentaire à la rencontre de Léda et du cygne par ailleurs riche de sous-entendus. Alors que la main passée par Léda derrière les épaules de sa compagne témoigne de leur intimité, leurs deux regards se focalisent sur la tête du cygne, suggérant une compétition pour attirer son attention …
3. Léda et le cygne, un des grands succès de Boucher
François Boucher présentait au Salon de 1742 sous le numéro 21 bis une composition représentant Léda et le cygne. La version d’atelier que nous proposons possède des dimensions très proches de cet original (59 x 72 cm versus 60 x 74 cm pour l’original)
Une version autographe de François Boucher, également de dimensions très proches (59.5 x 74 cm), figure au NationalMuseum de Stockholm et provient des collections de Carl Gustaf Tessin, ambassadeur de Suède à Paris entre 1739 et 1742. Cette version commandée par Tessin à Boucher a été envoyée en Suède dès le mois de juin 1742, avant la présentation du tableau au Salon d’août à septembre 1742.
Sur la base des photographies dont nous disposons, la version d’atelier que nous proposons nous semble beaucoup plus proche de la toile présentée au Salon que de la version conservée à Stockholm, en particulier dans le rendu de la végétation qui entoure les deux femmes, dans lequel nous retrouvons les délicates nuances bleutées qui ne figurent pas dans pas dans la version de Stockholm.
Ces deux versions autographes constituent la seule fois pendant laquelle François Boucher a représenté Léda et le cygne ; très apprécié lors de sa présentation, ce tableau a fait l’objet d’une douzaine de versions d’ateliers dont fait partie le tableau que nous proposons. Notre tableau est présenté dans un cadre en bois doré de style Louis XV.
Conditions générales de livraison :
Les prix indiqués sont les prix au départ de la galerie.
En fonction du prix de l'objet, de sa taille et de la localisation de l'acheteur nous sommes en mesure de proposer la meilleure solution de transport qui sera facturée séparément et effectuée sous la responsabilité de l'acheteur.
Retrouver le mobilier ou les objets d''art similaires à « Léda et le cygne par l'atelier de François Boucher (Paris 1703 - 1770) » présenté par Stéphane Renard Fine Art, antiquaire à Paris dans la catégorie Tableaux XVIIIe siècle Louis XV, Tableaux et dessins.