Par Antiquités Philippe Glédel
Mobilier XVIIIe parisien et régional, dont meubles de port.
Exceptionnelle commode bureau bibliothèque dite "scriban" à façade galbée en bois de Saint-Martin jaune de Guyane.
Au XVIIIe siècle, ce meuble est plutôt désigné sous le terme de bureau-cabinet, il est la combinaison de deux, voire trois meubles en un, comme nous le voyons ici, tout comme pour certains meubles bordelais : "une commode, presque toujours en tombeau, pour la partie inférieure; un secrétaire en pente au dessus, le gradin intérieur organisé à la manière d'un cabinet, des tiroirs galbés en retrait concave encadrant une porte en tabernacle; enfin l'ensemble supporte éventuellement une armoire, dans le cas le plus complet." M.F. Lacoue-Labarthe - Meubles bordelais, meubles de port.
Au contraire de la table en cabaret, ce n'est pas de l'influence parisienne que naquit la mode des commodes scribannes dans les grands ports français mais bien plutôt des relations que ceux-ci entretenaient avec les Pays du Nord. Il faut en effet voir son origine dans le ...
... cabinet hollandais ou "schrifcabinet" dont le corps inférieur est fortement bombé. Ce meuble, tout à la fois fonctionnel mais avec un fort esprit de représentation traduit bien le faste des sociétés marchandes du XVIIIe. A Nantes comme à Bordeaux, plus encore que la commode, c'est le scriban qui constitue le meuble emblématique de l'armateur fortuné ou du riche négociant.
Le bois de Saint-Martin jaune, appellation Angelim Rosa, est un bois exotique de couleur jaune orangé de la famille des Fabacées dont il existe trois variétés (le rouge : le plus plus commun sur les meubles de port, le jaune : le plus rare et le plus précieux, et le blanc : peu utilisé en ébénisterie). Il est originaire des Antilles et plus précisément des Caraïbes (tandis que celui utilisé pour les meubles des ports de l'Atlantique provient de Guyane où on exploite principalement, outre ce bois, le gaïac, le bagasse, le balata, le wacapou, l'amourette et l'ébène verte).
C'est un bois aussi dur que décoratif (qui se différencie de l'amarante et de l'acajou par son aspect ramagé dit "aile de perdrix") que l'on rencontre parfois en effet, bien que ce soit assez rarement (et s'y ajoute le fait qu'il n'est que très peu souvent identifié), sur des meubles de port depuis le XVIIe siècle. Il est d'ailleurs inventorié dans la liste des bois exotiques du Malfoy.
Pour notre part, nous ne l'avons jamais rencontré sur un meuble nantais, hormis dans sa variété rouge (encore que ce ne fut qu'une seule fois, et sur la plus exceptionnelle commode nantaise que nous avons achetée par le passé, ce qui nous laisse à penser qu'il était effectivement considéré dès le XVIIIe siècle comme un bois des plus précieux). Il semble par ailleurs que Landerneau se soit fait dans une certaine mesure une spécialité de l'emploi du Saint-Martin rouge puisqu'on le rencontre (épisodiquement) sur des commodes mazarine de belle qualité de cette cité.
Voir la commode landernéenne en Saint-Martin rouge que nous présentons également ou en documentation d'une commode de Landerneau : http://antiquites-gledel-philippe.chez-alice.fr/T-Commode-de-Landerneau-en-acajou-massif.html
La partie bibliothèque ouvre par deux battants et un faux dormant cintrés épousant le galbe de la corniche en accolade. Parcourus d'une double mouluration, ces battants sont fabriqués à panneaux pleins, faits d'une seule et même large planche d'un exceptionnel Saint-Martin jaune dont on peut admirer le rare aspect figuré (soulignons qu'il s'agit vraiment là d'un exemplaire très particulier dont on a su mettre les figures en valeur par un débit sur dosse). Les sections de bois employées sont épaisses et nous préciserons ici le poids du battant gauche pour s'en faire une petite idée : 14,8 kg. Quatre étagères d'origine en chêne, posées sur crémaillères (découpées dans la masse des montants) agrémentent son intérieur tandis que le dos, entièrement panneauté, est en chêne et noyer. On note la présence d'une seule entrée de serrure (ce qui correspond bien à une convention citadine / voir notre buffet de Pierre Hache) d'un modèle nantais de type flamme, quatre fiches à larder de qualité, une belle serrure à attaches découpées, deux targettes dont une à ressort actionnée par un cordon. En raison de son poids et de ses dimensions, la bibliothèque est fixée au bureau par deux chevilles à l'avant et deux tenons chevillés dans des mortaises du plateau, ainsi aucun risque de basculement à l'ouverture des portes dont nous avons évoqué le poids.
La partie bureau ouvre par un abattant à charnières et tirettes de soutien découvrant dix tiroirs en gradins, dont six galbés munis de charmants boutons à rosaces et quatre plus petits à chants plats découpés en cimaise, le tout encadrant une porte-tabernacle, elle-même flanquée de deux tiroirs secrets (pour ceux-là, notre menuisier a planché pendant plus d'une heure pour pouvoir les ouvrir). Juste derrière la porte, une tige de bronze au poucier en forme de feuille vient bloquer l'accès à une trappe secrète centrale dont la cave comporte deux mécanismes condamnant l'ouverture de deux autres caves latérales. Ainsi le bureau dispose au total de 16 ouvrants et tirants et on en comptera jusqu'à 24 sur le meuble tout entier. Notons enfin que toute la partie bureau est entièrement fabriquée en acajou de Saint-Domingue, y compris les fonçures des tiroirs dont les façades sont fabriquées dans un superbe acajou moucheté tandis que la porte est faite dans un non moins superbe acajou chenillé.
La partie commode, galbée en plan, ouvre par trois tiroirs à fonçures de chêne sur trois rangs et on remarque que le tiroir supérieur est d'une plus faible hauteur. Les tiroirs sont agrémentés d'entrées de serrures de style Louis XV dans l'esprit de celles de l'abattant et de la porte-tabernacle et de poignées tombantes à rosaces dites en pays nantais où on les rencontre fréquemment "à la marguerite". On observe une traverse basse au chantournement nerveux, bordée d'une moulure ressortie ornée de volutes affrontées également typiques du mobilier nantais. Enfin les pieds ornés de gracieuses volutes dit "en escargot" (à l'arrière comme à l'avant) sont encore dans la pure tradition du mobilier nantais de qualité.
Ajoutons pour compléter ce descriptif, six belles serrures d'origine en fer et 5 clés pour les actionner toutes.
Meuble d'excellence et de grand luxe, aux proportions élancées, fabriqué dans un bois d'une qualité exceptionnelle parfaitement mis en valeur par l'artisan ébéniste, et enfin dans un état de conservation d'origine absolument remarquable sublimé par un rempli-ciré d'un très beau fini.
Travail nantais du XVIIIe siècle.
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