Par Stéphane Renard Fine Art
37.5 x 50 cm (encadré 68.7 x 80.7 cm)
Provenance : Frédérique Tison, Château de Chassy (Bourgogne-Franche Comté – France)
Bibliographie : J. Clair, V. Monnier Balthus, catalogue raisonné de l’œuvre complet, Gallimard, Paris 1999 – numéro D513 reproduit en noir et blanc (page 231)
Œuvres en rapport :
• Une autre étude préparatoire (crayon sur papier – 33x45.1 cm) figure au catalogue raisonné sous la référence D512
• Un croquis dans un carnet de dessin (catalogue raisonné référence CC1469/9)
• Paysage de Fribourg, huile sur toile exécutée en 1944, dimensions 72 x 99 cm, référencée dans le catalogue raisonné sous le numéro P146 (vendu chez Sotheby’s le 4 décembre 1984 – numéro 71)
Balthus réside en Suisse pendant la guerre et cette étude préparatoire constitue un souvenir probablement éxécuté dans les derniers jours de son séjour à Fribourg. Evoquant les paysages des primitifs italiens, il nous présente un paysage ...
... immense et sans ombre, saisi par l’immobilité de l’hiver. Les différentes études préparatoires nous permettent de mieux comprendre le processus créateur de l’artiste.
1. Balthus, un artiste à part dans l’art du XXème siècle
Balthus occupe une place à part dans l’art du XXème siècle, souvent marqué par l’héritage de Marcel Duchamp ou tourné vers l’abstraction, en présentant une œuvre figurative, reposant sur une pratique rigoureuse du dessin et sur une maîtrise de la forme par une construction précise. L’œuvre attire et l’artiste déconcerte ; il y a un « mystère Balthus », largement entretenu et mis en scène par l’artiste lui-même. Son œuvre a ainsi fait l’objet de son vivant de nombreuses expositions organisées dans les plus grands musées du monde (au Musée des Arts Décoratifs à Paris dès 1966, à la Tate Gallery à Londres en 1968, au Centre Pompidou à Paris et au Metropolitan Museum of Art de New York en 1983-1984, au Palazzo Grassi à Venise en 2001, pour n’en citer que quelques-unes).
Balthus nait le 29 février 1908 dans une famille cosmopolite ; son père est d’origine prussienne et polonaise et sa mère, Elsa Dorothea Spiro, surnommée Baladine, d’une famille ashkénaze et russe. Sa famille se réfugie au début de la guerre en Suisse, où il continue de séjourner avec sa mère alors que ses parents se séparent.
En 1919 sa mère rencontre le poète Rainer Maria Rilke (1875 – 1926) qui devient son amant ; Balthus (le surnom du peintre dont il choisit de faire son nom d’artiste) est élevé dans le milieu artistique des amis de sa mère.
Balthus s’installe à Paris avec sa mère en 1924. Inscrit à l’académie de la Grande Chaumière, il fréquente l’atelier de Pierre Bonnard. En 1926 il fait un voyage en Italie où il découvre les fresques de Piero della Francesca et de Masaccio qui auront une influence durable sur son art. Proche des surréalistes, il réalise en 1934 sa première exposition personnelle. En parallèle de sa peinture, qui rencontre un succès croissant, il conçoit plusieurs décors de théâtre, de ballet et d’opéra, activité qu’il continuera jusqu’à l’après-guerre. En 1938 se tient sa première exposition à New-York.
Il se marie en 1937 avec Antoinette de Watteville (1912-1997) et le couple s’installe pendant la guerre d’abord à Champrovent en Savoie, puis à Fribourg en Suisse où naissent deux de leurs fils et enfin à Cologny près de Genève à partir de 1942. En 1945 le couple se sépare et Balthus rentre à Paris.
En 1953, Balthus, alors âgé de 45 ans, décide de s’installer au château de Chassy dans le Morvan. Il y est rapidement rejoint par sa nièce par alliance (la fille d’un premier mariage de la femme de son frère Pierre Klossowski), Frédérique Tison qui devient sa muse et sa maîtresse. A Chassy, Balthus a énormément travaillé et créé dans l’espace immense du château, face aux paysages du Morvan. Sa peinture évolue et se rapproche de la fresque à la manière des maîtres de la Renaissance italienne.
Frédérique Tison accompagnera Balthus à Rome quand celui-ci sera nommé Directeur de la Villa Médicis par André Malraux en 1961. Lors de leur rupture définitive en 1966 Balthus lui donne Chassy où elle s’installe. Balthus a rencontré en 1962 lors d’un voyage au Japon Setsuko Ideta qui deviendra sa femme en 1967. En 1977 ils s’installent à la fin de leur séjour romain dans le grand chalet de Rossinière (Suisse) dans lequel le peintre demeurera jusqu’à sa mort le 18 février 2001.
2. Description de l’œuvre
Ce paysage nous permet de découvrir de vastes horizons dans lesquels serpente la Sarine, la rivière qui traverse Fribourg. Le site est aisément identifiable sur un plan de Fribourg et a sans doute été dessiné de la terrasse du couvent des Cordeliers, en surplomb sur l’autre rive. Les collines d’un dessin assez géométrique s’étagent vers l’horizon ; le paysage est structuré par les nombreux chemins qui le traversent. La présence humaine se résume à une minuscule silhouette énigmatique au bord de la rivière. Son introduction permet de mesurer la distance qui nous sépare de l’autre berge et de suggérer par la même l’immensité de ce panorama. A l’instar des paysages figurés en arrière fond des primitifs italiens, aucune ombre n’est représentée, ce qui confère à ce paysage d’hiver une étrangeté hypnotique.
Le côté assez vaporeux du dessin, dans lequel le paysage parait comme noyé dans une brume hivernale, contraste avec la précision avec laquelle sont décrits le groupe de bâtiments et les quelques arbres qui l’entourent au premier plan sur la gauche. Cette description minutieuse, jointe au côté assez germanique du bâtiment évoque la précision des paysages de Dürer.
3. Œuvres en rapport et processus créatif
Une esquisse conservée dans un carnet de dessin et un autre dessin préparatoire nous permettent de mieux comprendre le processus créatif de l’artiste menant à la réalisation du tableau définitif.
Il nous paraît vraisemblable que l’étude dans le carnet de croquis soit la première pensée pour le tableau et que Balthus ait dans un deuxième temps étudié séparément la partie droite (qui constitue le dessin que nous présentons) et la partie gauche du tableau dans deux études distinctes qui se superposent en partie (la maison au pied de la colline sur notre dessin étant celle que nous retrouvons à l’extrême droite de l’autre étude).
Alors que Balthus reprend avec précision le groupe de bâtiment qui figure à droite de notre dessin, celui qui figure à gauche de l’autre étude est considérablement simplifié dans le tableau définitif, alors que la rivière au premier rang acquiert une place beaucoup plus importante.
Nous avons choisi d’encadrer ce dessin préparatoire dans un cadre espagnol du XVIIème siècle aux dorures fanées qui renforcent encore le caractère intemporel de ce paysage hivernal.
Principale référence bibliographique :
J. Clair, V. Monnier Balthus, catalogue raisonné de l’œuvre complet, Gallimard, Paris 1999
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