Par Galerie Pellat de Villedon
Mobilier, objets d'art et tableaux
Une exceptionnelle marquise en bois laqué reposant sur quatre pieds cannelés et rudentés, surmontés d’une rosace sculptée. Les traverses de l’assise ainsi que la traverse supérieure du dossier sont décorées par une tige enrubannée soulignée par des gorges moulurées. Les accotoirs en forme de console inversée sont sculptés dans la partie basse par des feuilles d’acanthe, surmontés de piastres, se terminant pour la partie haute par un enroulement mouluré formant une volute couronnée par un chapiteau feuillagé.
Estampillée par Georges Jacob
Epoque Louis XVI
Garnie d’une tapisserie au point à fond bleu dans un encadrement de guirlandes roses
Restaurations d’usage
H. 91,5 x L. 83 x P. 45 cm
Le XVIIIe siècle propose une multitude de sièges. Chacun d’eux reflète, dans les demeures les plus prestigieuses, une organisation quotidienne, un art de vivre à la française. Ils sont également les témoins du bouillonnement artistique que de riches ...
... commanditaires exigent et auquel participent les artisans parisiens. La marquise que nous présentons aujourd’hui en est un parfait exemple.
Ce siège que nous appelons « marquise » est un siège datant du règne de Louis XVI. Il est laqué de couleur crème, garni d’une tapisserie au point à fond bleu moderne. Il mesure 91,5 cm de hauteur, 83 cm de largeur et 45 cm de profondeur. Ainsi, il offre une large et confortable assise pour son propriétaire. Cette dimension est caractéristique des marquises : elles sont vues comme des canapés de petites tailles ou alors comme des grandes bergères. Nées au milieu du XVIIIe siècle, elles prennent place dans les salons et deviennent de plus en plus courantes. Elles sont destinées à un usage féminin, puisque seules les dames s’y asseyaient.
D’autre part, en plus d’avoir été un meuble quotidien, voire intime pour une luxueuse clientèle, ce modèle est symptomatique d’un style s’inscrivant dans la fin du XVIIIe siècle : le style Louis XVI. Après avoir subi les courbes et contre courbes du Rocaille, les commanditaires souhaitent revenir à la ligne droite, au goût de l’Antiquité. Les formes des sièges ne se modifient que tard par rapport au reste du mobilier, c’est à dire vers 1770 et nous n’inventons pas de nouvelles formes de sièges. Il s’agit alors de la pleine maturité du « style à la grecque ». Notre marquise illustre en effet cette mode : elle est de forme carrée, droite, aux proportions parfaites, avec des harmonies symétriques. Ses consoles d’accotoirs sont à l’aplomb des pieds antérieurs comme tous les autres fauteuils de cette époque.
Par ailleurs, son décor est lui aussi tout à fait « à la mode ». D’une manière générale, les traverses et montants de l’assise et du dossier sont plus abondants que sous le style Louis XV. Il n’y a plus de petits bouquets isolés mais des motifs répétés le long des bordures, aux dés de raccordement. Notre marquise illustre ce changement par des rubans entortillés (ayant deux sens s’opposant, ce qui prouve la grande qualité de ce siège), des sequins naissant d’une acanthe sur les supports d’accotoirs, des enroulements au sommet des montants. Les pieds cannelés rudentés se terminant par un simple étranglement sont également typiques des années 1770-1780. Les sièges étaient souvent laqués comme le prouve le siège de notre étude.
Ce qui fait de cette marquise une œuvre indispensable pour chaque collectionneur de mobilier, c’est son auteur. La marquise a été réalisée par le maître Georges Jacob d’après l’estampille que comporte le dessous du siège. Il est le menuisier incontournable en cette fin de siècle (fournissant la Couronne). Il est audacieux et possède une grande notoriété déjà de son vivant. Il reçoit sa maîtrise en 1765 ce qui le fait quasiment tout de suite basculer dans des expérimentations stylistiques Transition et Louis XVI. Par la suite, ce dernier conduira toute sa carrière.
Il connaît un tel succès car ses productions sont d’une qualité d’exécution rare (il arrondit l’intérieur de la ceinture pour rendre le siège plus léger par exemple). Il n’hésite pas non plus à innover : dans les formes de sièges, dans les décors comme avec le « carré » ou la « case » ornée d’une rosace dans la ceinture au-dessus des pieds (tel que le présente notre marquise). Cet élément sera repris pendant plus d’un quart de siècle. Ainsi, il devient l’un des initiateurs du classicisme dans les années 1770 tant son travail est diffusé et plait.
De cette manière, en plus d’être un siège de salon incontournable pour un collectionneur, un siège représentatif du style Louis XVI, il est aussi le symbole du travail d’un des plus grands artisans des arts décoratifs.
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