Par Galerie Pellat de Villedon
Mobilier, objets d'art et tableaux
Meuble à transformation en acajou formant un pupitre de musicien grâce à un système de crémaillère orné de deux bras de lumière amovibles. La ceinture ouvre par trois tiroirs dont un laissant découvrir la place d’un encrier, et par une tablette dépliante écritoire. Elle est agrémentée d’une frise d’arche en orbevoie. L’ensemble repose sur un fût central à six pans et sur un piétement tripode.
Vers 1780
Attribué à l’ébéniste Canabas (reçu maître en 1766)
Restaurations d’usage
H. 135 x L. 51 x P. 25 cm
L’oeuvre que nous présentons aujourd’hui fait partie des meubles à la fois recherchés pour leurs lignes simples mais d’un équilibre parfait, pour leur ingéniosité mécanique et pour leur destination particulièrement innovante.
Il s’agit d’un meuble à transformation allant de la forme de guéridon au déploiement d’un pupitre de musicien. Tout est pensé pour rendre le meuble le plus raffiné possible mais aussi le plus ...
... pratique. De nombreux tiroirs sont intégrés pour ranger des partitions ou autres papiers. Un encrier y est prévu, une tablette écritoire se déplie et se dissimule aisément pour annoter des compositions musicales interprétées. L’inclinaison du pupitre est réglable tout comme la hauteur de ce dernier (grâce à un système crémaillère). Deux bougeoirs amovibles permettent une lecture éclairée.
Ce modèle de pupitre est bien connu. Nous pouvons citer celui appartenant à la Galerie Perrin reproduit dans l’ouvrage de Pierre Kjellberg (« Le mobilier français du XVIIIe siècle »), ou bien le lot n°85 vendu le 19 octobre 2006 à New York par la maison de vente Christie’s. Celui qui en est l’auteur est Joseph Gergenbach, plus connu sous le nom de Canabas (1712-1797). Nombre de ses pupitres sont estampillés, d’autres non mais il est quasiment certain qu’ils soient tous de sa main. Ils possèdent toujours un fût central à base tripode (comme ses guéridons). Appelé « le grand maître des petits meubles en acajou », Canabas naît en Allemagne mais vient dès l’année 1745 à Paris. Il travaille d’abord auprès des plus grands : Jean-François Oeben et Pierre Migeon. L’ensemble de son oeuvre personnelle est aisément reconnaissable : en acajou massif ou en placage d’acajou d’excellente qualité, peu de décors hormis des moulures discrètes et très peu de garnitures en bronze. La plupart de sa production est de style Louis XVI.
Canabas est particulièrement apprécié : il fait partie des ébénistes les plus recherchés. Cet engouement est dû à ses choix artistiques : il réalise des petits meubles utilitaires et de conceptions nouvelles, étudiés pour servir à des usages précis.
En plus d’être un charmant petit meuble curieux, notre pupitre se singularise par son décor. Aucun autre pupitre de Canabas orné d’une galerie d’arche en orbevoie nous est connu. Les pupitres de l’ébéniste sont toujours sans aucun décor. Le meuble de notre étude est davantage travaillé et fait référence à un goût très en vogue à la fin du XVIIIe siècle : l’anglomanie. Ce dernier vient de l’inspiration du mobilier anglais (aux nombreuses balustrades et aux dossiers ajourés) et aux palais chinois. Ce goût développé par les anglophiles fait peu à peu disparaitre la marqueterie au profit de l’acajou comme en témoigne notre petit meuble.
Sources :
Kjellberg (Pierre), Le mobilier français du XVIIIe siècle, Les éditions de l’amateur