Par Galerie Gabrielle Laroche
Cassone aux armoiries de la puissante famille florentine des Tornaquinci.
Après la Renaissance, les coffres figurent parmi les plus belles pièces de mobilier, installés à demeure dans les chambres et salles d'apparat. Aux scènes peintes et dorées qui habillaient les palais italiens jusqu'alors, le XVIe siècle préfère le bois naturel, avec une prédilection pour le noyer. Lorsqu'elle perdure, la polychromie, ici disparue, se concentre sur les armoiries du propriétaire, l'illustre famille florentine des Tornaquinci.
Cette imposante cassone florentine présente une belle façade cantonnée aux angles de deux très belles feuilles d’acanthe terminées en volute, prolongées par deux pieds puissants en forme de patte de lion.
Le décor se déploie avec faste sur la façade, sculptée dans la masse. Au centre, deux cadres rectangulaires, ourlés d'un cordon d'oves et de billettes, exposent des rinceaux fleuris épanouis en panache. Ils encadrent le médaillon central, ...
... porteur du blason, posé sur un cuir découpé, serti d’une couronne végétale ponctuée de fleurs et de draperie.
L’abattant supérieur relié au corps du meuble par deux belles pentures de fer forgé, est cerné d’un cadre de bois mouluré, et plaqué d’une feuille de bois travaillée en courbe qui permet de placer en surélévation, la plate-forme supérieure.
Les côtés sont lisses au-dessus de la frise de godrons.
Grand coffre meublant, cette imposante cassone en noyer sombre est meuble d'applique, placé le long d'un lit ou contre le mur d'une pièce: la face arrière lisse et les montants arrière formant pied l'attestent.
Les proportions, la beauté du noyer et l'éminente qualité des sculptures, placent ce coffre parmi les pièces exceptionnelles produites par la Renaissance florentine, après que Savonarole eut dénoncé et tenté de détruire le modèle peint qui l'a précédé.
Cette puissante cassone a une facture très proche de celle de la table toscane, XVIe, qui se trouve au Palazzo Davanzati à Florence.
ARMOIRIES
Ecartelé d’or et de sinople au chef chargé de trois fleurs-de-lys rangées entre les quatre pendants d’un lambel.
Ces armoiries sculptées sur notre cassone sont celles d’une très ancienne famille florentine les Tornaquinci, une des plus puissantes par sa permanence dans la ville.
Venus de Rome, leur présence à Florence remonte aux temps d’Otton I, de qui ils auraient reçu le privilège de construire sur l’Arno où ils possédaient de vastes territoires sur les rives.
Quand on constuisit la seconde muraille, la porte dite depuis, de Saint Pancrace, pris leur nom.
A la fin de 1166, ils participeront aux plus importantes charges de Florence.
Un Figlicaro fut consul avec la responsabilité des milices civiles. Dix ans plus tard, Jacopo entrait au conseil des anciens.
Au milieu du tumulte de 1215 qui verra l’opposition des Donati et des Buondelmonti, les Tornaquinci se rangèrent derrrière ces derniers et quand le conflit civil devint une vraie guerre ils choisiront les guelfes. Comme beaucoup de familles, après la défaite des guelfes les Tornaquinci abandonneront Florence pour n’y revenir qu’en 1266, quand la situation se retounera aux dommages de gibelins.
L’ordre momentanément rétabli, les Tornaquinci retrouvèrent leur influence, participant au Conseil de 1278 à 1284.
Ils furent de prestigieux combattants et bien des leurs se distingueront par leurs faits d’armes.
Dans la deuxième moitié du XIIIe siècle, les banquiers florentins accumulèrent des richesses astronomiques pratiquant toutes sortes d’affaires mais surtout le prêt d’argent condamné par l’Eglise.
C’est en France que cette famille obtiendra les gains plus importants, et ils se stabiliseront à Angers dont ils prendront la citoyenneté, puis ouvrirons à Caen en Normandie une succursale pour les affaires de change et le commerce de textiles.
Cette puissance financière fut fatale aux Tornaquinci à cause d’une réforme; ils furent classés parmi les Grand et écartés des offices publiques.
Ils ne cessèrent pas d’être une famille respectée. Ce qui le démontre est le fait que la République se servit des membres de cette maison, pour diverses ambassades ou missions de représentation.
Mais l’éloignement de la scène politique fut nuisible à leur situation financière et ils connurent la décadence au XVe siècle.
La République tombée, les Tornaquinci purent retrouver, au moins en partie, leur antique splendeur. Giovanni di Bartolommeo fut commissaire de Montepulciano, Cortona et Pistoia et élu sénateur en 1649; la même charge échut à son fils en 1732.
Les autres furent gentilhommes de la Chambre du prince Cardinal Francesco Maria.
Sénateur fut aussi, Giovangaetano di Giovannantonio, tandis que son fils fut secrétaire du Grand Duché Giangastone et fut invité à faire partie du conseil de régence pour le grand-duc Francesco III en 1737.
La famille s’est éteinte avec Lucas frère de Givanantonio, mort en 1790.
Bibliographie
PEDRINI A., Il mobilio gli ambienti e le decorazioni del rinascimento in Italia, secolo XV e XVI, Azienda Libraria Editoriale Fiorentina, Florence, 1948 (p. 117 Fig.308)
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