Sans doute originaire d’Arras, Charles Topino démarre sa carrière comme ouvrier libre du Faubourg Saint-Antoine à Paris. Il est le frère du marchand-ébéniste Jean-Baptiste, connu sous le pseudonyme de Lebrund et le neveu du peintre Topino-Lebrun. Maître en 1773, il est appelé en 1782 à la charge de député de la jurande des menuisiers-ébénistes. Reconnu en France et à l’étranger, Topino attire une nombreuse clientèle de marchands-merciers et de confrères ébénistes comme Boudin, Migeon ou encore Delorme mais aussi de seigneurs français comme le marquis de Graville.
Au premier rang des petits maîtres de son siècle, sa production se caractérise par des œuvres très personnelles et très reconnaissables, qui appartiennent essentiellement aux styles Transition et Louis XVI. Les marqueteries, décorées de vases de fleurs, écritoires et divers ustensiles, tels que des tasses, des théières, des jattes - présentées à la manière de natures mortes - ou encore des cartes de jeux et des livres constituent les éléments les plus caractéristiques de ses meubles. Elles s’inspirent le plus souvent des bordures de paravents chinois en laque de Coromandel qui emploient ces mêmes motifs. Réunis dans un compartiment ovale, rond, carré ou disposés en frise, les décors sont très généralement vus de profil et leur découpe, très simple, nécessite un petit nombre de morceaux de bois repris au burin pour les détails. On les trouve sur des petits meubles Transition, pour lesquels Charles Topino marque une nette préférence, principalement sur des bonheurs-du-jour et sur des petites tables de salon. Parmi les bonheurs-du-jour, il réalise principalement ses modèles sous une forme classique, de plan rectangulaire mais aussi quelques modèles de forme ovale qui constituent une nouveauté du genre qu’il affectionne particulièrement. Fréquemment ovales, elles aussi, les tables marquetées d’objets usuels comportent, dans la plus grande partie des modèles, un tiroir au centre de la ceinture et, sur les côtés, deux petits tiroirs qui pivotent.
A côté de ces décors originaux, Charles Topino a aussi pratiqué les marqueteries de fleurs et de paysages. Les premières apparaissent en plus grand nombre sur les meubles Louis XVI. Les secondes, aux scènes champêtres, dans le goût chinois ou d’architectures, ornent plus fréquemment des petites tables tambour rondes, sur trois pieds galbés. Ses plus nombreuses et meilleures productions restent les tables fantaisies de toutes sortes : rondes, ovales, carrées, en corbeille et en jardinière, « à l’anglaise » et « à la jésuite », en acajou incrusté de cuivre, en laque de Chine, en bois des Indes, en placages bordés de grecques ou encore en mosaïques à carreaux et en marqueterie. La commode demi-lune Louis XVI marquetée de fleurs figure également parmi les modèles favoris de l’ébéniste. Il en existe de dimensions différentes. Toutes présentent, sur un fond de bois clair, des marqueteries de corbeilles, de bouquets, de guirlandes de fleurs, qu’encadrent des baguettes en bronze ciselé. Les montants et les pieds fuselés sont marquetés de ciselures simulées. A côté de ces modèles, Topino a également réalisé quantité de meubles de très bonne qualité mais de facture moins personnelle. Son estampille figure ainsi sur des commodes Transition classique, de petites tables ovales marquetées de quadrillages ou plaquées de bois de rose en feuilles ou encore sur des commodes et des bureaux à cylindre Louis XVI en acajou.
Malgré une belle carrière, la mauvaise gestion entraînée par la mauvaise tenue de ses livres de compte et la Révolution contraignent Charles Topino à mettre la clé sous la porte le 21 décembre 1789.
MUSÉES
- Paire de consoles dessertes, bois noirci, laque de Coromandel, bronze doré, marbre bleu turquin. De forme demi-lune, elle comporte deux plateaux superposés et, trois tiroirs dans la ceinture, dont deux ouvrent latéralement. Le tiroir central contient un pupitre et un écritoire. Elle repose sur quatre pieds en gaine et à sabots de bronze. Les plateaux et le fond sont faits avec des motifs de paravent en laque de Coromandel, de couleur noire avec des motifs de couleurs brune, orange, rouge et dorées. Riche décor de bronze doré comprenant une frise de rinceaux et feuilles d'accanthe, une rosace pour l'entrée de serrure, rangs de perles, chutes à trophées, galeries ajourées et sabots. Dessus de marbre en bleu turquin. - N°MAD1573 et 2035 - Musée des Arts Décoratifs - Lyon
- Bonheur du jour, Table en chiffonnière - Musée des Arts Décoratifs - Paris
- Bonheur du jour, Meuble d'appui - Musée Cognacq-Jay
- Table de toilette "En coeur" - Musée Nissim de Camondo
- Cabinet - Wallace Collection
BIBLIOGRAPHIE
- Charles Topino - Les Cahiers du Mobilier - Sylvain Barbier Sainte Marie - Les Editions de l'Amateur - 2005
- Les ébénistes du XVIIIe siècle - Comte François de Salverte - Les éditions d'Art et d'Histoire - 1934
- Le Mobilier Français du XVIIIème Siècle - Pierre Kjellberg - Les Editions de l'Amateur - 1989